Presse
Voiles et voiliers n°640- Chantier Rosewest – des Day-boats Hédonistes
Juin 2024
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Juin 2024
On ne naît ne naît pas nécessairement constructeur de bateau mais on peut décider de lancer un chantier, de choisir sa vie en quelque sorte, comme nous l’explique Hervé Nollet : “J’ai fait ma crise de la cinquantaine : Je faisais bateaux pour moi” Jusque-là, le designer industriel, a aussi, dans une autre vie, traqué du teck en Birmanie (pour réaliser des ponts de bateaux et des bateaux) et est toujours depuis un amoureux du style. S’attaquer au dessin puis à la construction d’un bateau lui a demandé de résoudre des problèmes d’ingénierie, mais aussi de trouver le bon équilibre entre un design élégant et un bateau qui marche bien sur l’eau.
Lancé à Lorient, le chantier s’est rapidement installé (en 2007) à Bordeaux, où il profite d’un emplacement idéal, sur les bassins à flot du port de plaisance. Le style très chic du premier bateau à vite séduit les plaisanciers du bassin d’Arcachon. Il est vrai que les lignes élégantes du premier Cape Cod, sa finition haut de gamme et son pont latté ont fière allure. Et le fait qu’il s’agisse d’un dériveur très facile à échouer est un atout considérable pour un day-boat avec lequel on peut profiter du banc d’Arguin ou de l’île aux Oiseaux.
Le Cape Cod 896 et son cockpit ultraconfortable a donc très vite été associé au bassin d’Arcachon alors que ses qualités marines peuvent s’exprimer ailleurs. D’autant que sa principale caractéristique est ce look très classique. L’idée était de ne surtout pas essayer de concurrencer les gros chantiers mais, au contraire, de viser un marché de niche. Aller chercher les amoureux de la belle plaisance mais leur proposer un voilier en composite avec un accastillage moderne et un minimum de contraintes. Comme le dit le patron de Rosewest : « Ce n’est pas un bateau d’intégriste, c’est la belle plaisance sans les emmerdes qui vont avec. » Avant de lancer le Cape Cod,
Hervé avait construit des bateaux à l’unité, à moteur ou à voile, mais toujours à tendance hédoniste : « je n’ai jamais fait de bateaux en acier ou en alu pour faire le tour du monde, plutôt des bateaux plaisir où la bouteille de rosé reste è portée de main du barreur.” Des bateaux entièrement réalisés en teck par des artisans birmans. Il en a vendu quelques-uns en Angleterre, d’autres sont restés en 1Asie, où ils naviguent du côté de Singapour. Il lui en reste quelques-uns stockés dans son chantier bordelais, construits dans un bois d’une qualité incroyable. Aujourd’hui seul un Cape Cod sur trois présente un pont en teck, l’approvisionnement étant devenu problématique.
A la sortie du Cape Cod, les premiers visiteurs adhèrent vite à la philosophie de ce bateau et comprennent qu’il s’agit d’un produit français. Pour les Américains, c’est nécessairement un voilier américain, même si seulement trois exemplaires sont partis outre-Atlantique, faute de revendeurs sur place. Dans le même esprit que le Cape Cod, mais côté bateau à moteur, le Long Bay a fait long feu : la production s’est arrêtée en 2018 après deux ans et quelques unités vendues « On est une petite structure, « On n’a pas vocation a grossir et on préfère faire des voiliers. La construction de bateaux à moteur nous demandait trop de temps justifie Hervé Nollet.
Retour donc vers la voile pour un autre dayboat,à la fois plus petit et aux lignes plus modernes. Ce sera le Cape Cod 767, un voilier qui entre dans le gabarit routier et qui se veut plus performant. Ce nouveau bateau a trouvé des clients sur le bassin d’Arcachon comme son grand frère, mais aussi en Bretagne, en Espagne et sur la Côte d’Azur. Un démarrage plus varié que celui du Cape Cod 896, qui est aujourd’hui à plus de 50% destiné à l’export. « Il ne s’essouffle pas, quand les gens le découvrent, c’est un nouveau bateau » assure Hervé.
Mais la vraie nouveauté à venir, c’est une version «speed» du 767 qui devrait très vite sortir des cartons pour montrer qu’un dériveur intégral peut rivaliser avec des quillards.
Voiles et Voiliers: Est-ce qu’on peut s’improviser constructeur de bateaux?
Hervé Nollet: On ne s’improvise pas, c’est un long chemin. Des bateaux, j’en fais depuis 35 ans. Je n’en faisais que pour moi puis pour des amis et, il y a une dizaine d’années, par gourmandise, je me suis mis à plein temps sur ce qui me plaisait le plus. Mon métier de designer industriel m’a appris à dessiner des produits pas trop moches et qui fonctionnent !
Ce n’était que cela au début, vraiment un loisir.
V&V : Comment as-tu défini ce premier bateau, le Cape Cod, qui est très particulier (dayboat, dériveur intégral, tonture très marquée) et à rebours de critères modernes ?
H. N.: Il est né quand on s’est installé à Bordeaux. Le principe de départ était de faire un dériveur intégral. Je me partage entre la Bretagne Sud et Bordeaux et le marnage limite le terrain de jeu d’un quillard. J’avais une bonne culture des bateaux de la Nouvelle-Angleterre, d’où le nom Cape Cod, avec le côté un peu chic à la Kennedy. Le bateau a facilement trouvé sa place sur le bassin d’Arcachon. J’ai surtout donné la priorité au cockpit en mettant le curseur à 80% dessus, contre 20% sur la cabine. Pour moi, la cabine ne sert à rien, mes clients ne dorment pas dans leur bagnole et ne dorment pas non plus dans leur bateau.
Occasionnellement, on pourra y passer une nuit mais cela sert surtout de coffre.
V&V : Quelle a été ta démarche pour le 767: est-ce que l’idée était de faire un bateau moins cher?
H. N.: Il n’y avait pas d’objectif de tarif mais celui de revisiter ce concept de dayboat épicurien sur un plus petit bateau pour gagner en autonomie, pouvoir le mettre à l’eau et le mâter tout seul, pouvoir le remorquer derrière sa voiture. Il ne fallait surtout pas faire un Cape Cod en plus petit, on aurait perdu l’ADN. Le 767 a le même cahier des charges mais avec une signature plus moderne et un niveau de performance plus élevé. Ce n’est pas la même clien-tèle, car c’est un voilier rapide autant qu’un dériveur intégral, sans être un monotype de régate. Et c’est un bateau avec du volume, on propose pas mal d’astuces pour profiter de la vie à bord